Je me lève avec des céphalées, mais j’ai bu un peu cette nuit, n’arrivant pas à dormir, lassé de lire. Je savais que ces quelques rasades me gâcheraient la journée. J’avale un comprimé de paracétamol, répond à des questions de XL sur le salon de C qui approche. Ce dernier marque symboliquement pour moi le début de la saison. La semaine suivante d’ailleurs, j’aimerais sortir mon stand aux puces de B, pour essayer. Au sous-sol avec une bonne pile de livres à envoyer. Au préalable, j’ai pris soin de recharger la batterie de mon véhicule pour ne pas avoir à transporter les deux sacs pleins, à pied sous la pluie. La camionnette démarre sans problème, je pars à la poste - déserte - peu avant la levée. En me penchant vers un cabas pour ramasser un colis, je ressens une douleur soudaine et piquante à la hanche droite. J’étouffe un râle, mets quelques instants à récupérer. Je ne suis pas sorti du week-end et manque certainement d’activité physique. De plus, la nuit éthylique m’a probablement fait dormir de travers, comme souvent. Je peste contre moi d’avoir cédé à ce penchant. Pourtant, je ne bois plus qu’occasionnellement. J’ai lutté des mois contre l’habitude de me laisser aller quotidiennement, pendant de longues périodes, à la boisson. Je buvais seul la plupart du temps et c’était comme lire en moi des lignes jamais lues, pas plus qu’écrites, sans doute des soliloques d’ivrogne, mais qui me garantissaient parfois le ravissement d’idées nouvelles, artificiellement, alors que ces idées, ces révélations s’étaient taries, avec l’âge, peut-être, la lassitude ou du fait d’une relation à J en échec. Finalement, quand J a quitté la maison, j’ai pu me remettre à croire en une vie acceptable. Mais j’ai pris un moment avant d’aller de nouveau découvrir les idées dans les livres, ainsi que dans les mots que je trace moi-même. J’ai mis du temps avant d’écrire à nouveau. Ici même, voilà presqu’un an jour pour jour. Ainsi, je peste contre moi de m’être soumis au vieux remède, mais me pardonne aisément, puisque je comprends qu’il ne provoque plus le même effet sur moi. Justement, il m’accable, me plie l’épine dorsale. La potion s’est mue en poison. Heureusement, je ne suis pas contraint de rentrer à pied. Je traîne une patte molle dans les allées du supermarché, fend le nuage humide qui habite le village aujourd’hui. J’appelle SB qui me donne des nouvelles d’elle et de son épouse, participe à une réunion pour le salon de C, encore. Dans la soirée, je saisis une livrée en stock. Je me décide enfin à entrer les romans avec envois de Patrick Modiano, en services de presse, que j’avais achetés à MK à la fin de l’été au salon de N.